ღ Arnkatla et Lusitania

Quelques jours étaient passés depuis la catastrophe qui avait ébranlé tout skyline. Et rien ni personne n'avaient été épargnés. Lusitania n'était resté que trois jours à l'hôpital malgré le bout de lustre qu'elle avait reçu dans le dos et qui avait fini par la transpercer. En fait, elle n'avait presque pas de séquelle de cette catastrophe mise à part le bandage qui lui enserrait la poitrine ainsi qu'un léger problème de respiration. Mais elle détestait les hôpitaux, surtout quand on sait que la dernière fois qu'elle y était allé, c'était après la fusillade qui l'avait longuement handicapé. Bref, aujourd'hui, elle était décidé à aller voir les dégâts au commissariat et peut être faire un peu de rangement. Elle se fit déposer au commissariat par une amie. En apparence, la bâtisse² n'avait pas l'air trop touché par le tremblement de terre. Mais se fut une toute autre histoire une fois à l'intérieur.

Les bureaux étaient sans dessus dessous. Certains néon étaient tombés au sol et les casiers contenant les rapports jonchaient le sol. La jeune policière se fraya un chemin jusqu'à son bureau pour y découvrir une vision d'horreur. Son bureau était couché sur le sol, les tiroirs ouverts. Sa tasse de café était en mille morceaux et l'ordinateur était en miettes. Soupirant, la jeune femme ramassa une photo. Le cadre était brisé mais la photo était intact. Elle prit le temps de regarder la photo, une photo de Dan, gentiment offerte par Annabelle. La rangeant dans son sac à main, la jeune femme repartit de son bureau, n'ayant plus rien à faire ici. Mais en arrivant dans le hall, elle vit une femme qui semblait perdu dans l'effervescence du commissariat. Elle demanda au policier de l'accueil s'il savait qui elle était et pourquoi elle venait mais il lui rétorqua qu'il avait plus urgent à faire que de s'occuper des âmes perdues. Soupirant, Lusitania s'approcha de la femme.

"Bonjour. Vous avez besoin de quelque chose?"

Arnkatla était assise en plein milieu de son salon. Désespérée. Cela faisait plusieurs jours que le Skyline avait été secoué par la catastrophe, pourtant elle n'arrivait pas à voir le bout des dégâts. Certaines toiles étaient abîmées mais encore relativement en état, d'autres semblaient intactes et certaines auraient besoin de retouches. Dans l'ensemble, ses oeuvres bien protégées n'avaient pas trop souffert. La chance au fait qu'elle avait peu de mobilier et donc peu de facteurs de dégâts en cas de tremblement. Les murs avaient tenu mais les rares meubles étaient bien souvent renversés. Après la fin du tremblement, elle avait commencé à faire le tour du propriétaire, classant ses toiles et ses rares affaires. Il y avait beau y avoir dix ans qu'elle était là, elle avait accumulé peu de choses à l'exception de ses tableaux. Elle s'encombrait, une habitude qu'elle avait gardé de son vivant, heureux ou non. Les voyages puis la vie en solitaire l'avaient empêché de s'attacher au matériel. Le tri fut vite fait pour ses affaires et même ses vêtements mais elle avait plusieurs centaines de travaux et le plus dur était là. Elle était épuisée. Il y avait trop longtemps maintenant qu'elle n'avait pas touché un pinceau et elle était en manque, comme une droguée. Si ce n'est que sa drogue à elle, c'était peindre. Elle se leva tant bien que mal et se décida enfin à faire la liste. Elle les classa par année, dix séries.
Au début, elle ne remarqua rien mais bien vite, elle vît que le compte n'y était pas. Elle fut d'abord surprise. Elle avait beau entreposer toutes ses toiles ici avec le temps, peut être en avait-elle mis ailleurs dans la maison. Elle fit le tour des décombres et quelques pièces de sa bâtisse mais rien, pas même une toile inachevée. Elle continua le compte afin de vérifier qu'elle n'avait rien oublié mais non, il y avait quelque chose qui n'allait pas. Arnkatla ne comprenait pas pourquoi, ça n'avait tout simplement pas de sens. Où ses toiles pouvaient-elles bien être passés ? Elle compta le nombre de pièces manquants, une petite dizaine. Elle n'avait absolument pas ça. Un mauvais pressentiment la prit. Et si ? Ils n'auraient pas osé ? Elle s'était à peine absentée quelques heures la veille ?
Elle était anéantie. Elle n'avait que faire de ses biens mais au fil des années, elle n'avait plus vécu que pour ses toiles, comme des morceaux d'elle-même. Elle envisagea un instant d'aller faire justice elle-même en allant frapper directement aux portes de ses pourris de voisins. Mais elle se rétracta assez vite. Pour avoir été mariée à un avocat, elle connaissait le fonctionnement de la justice et elle n'avait aucune envie de payer pour eux. Cette idée lui donnait une vague impression, comme un mauvais souvenir. Elle hésita puis se décida enfin. Elle se doutait qu'ils devaient être débordés à l'heure qu'il était mais elle ne voulait pas attendre plus longtemps. Elle s'habilla aussi décemment que possible, s'assura d'avoir mis en lieu sur les toiles restantes et prit la direction de la ville pour rejoindre le commissariat. Elle tenta de ne pas prêter attention au voisinage de crainte de revenir sur sa décision.
Le lieu dans lequel elle arriva était bien plus en ruines que son habitation. Partout les individus s'agitaient autour d'elle et elle se sentit perdue. Elle n'avait toujours pas la foule, c'était certain. Elle ne savait pas à qui s'adressait, à vrai dire elle n'avait jamais mis les pieds dans un commissariat, même à la disparition de sa mère. C'était son père qui avait fait la déclaration et elle était restée à l'extérieur. Une jeune femme pourtant finit par s'approcher d'elle lui demandant si elle avait besoin de quelque chose. En dépit de la situation, Arnkatla sourit, un peu plus rassurée.

- Bonjour. Je viens pour faire une déclaration de perte ou de vol. Je ne sais plus comment on appelle ça

ღ Arnkatla et Lusitania

Il n'y avait pas à dire, la jeune femme en face de Lusitania avait l'air de plus en plus perdu au fil des minutes. Si bien que Lusitania se sentit obligé d'aller l'aider, se souvenant parfaitement de ses crises d'angoisses après la fusillade qui avait eu lieu quelques mois avant. La jeune policière s'approcha donc de la brune et lui demanda ce qu'elle voulait. La jeune femme en face d'elle sembla soudain rassuré de voir que quelqu'un s'intéressait enfin à elle. Elle venait pour une déclaration de vol. Avec le séisme qui avait eu lieu quelques jours avant dans le skyline, c'était plus que probable que des vols et des pillages devaient avoir lieu tous les jours. Lusitania lui sourit avant de la guider vers un bureau à peu près debout.

"Venez, on va s'occuper de cela tout de suite."

Lusitania tendit une chaise à la jeune femme et prit elle même place derrière le bureau. Elle essaya d'allumer le pc mais ce dernier décida de rendre l'âme dans un crissement de rouage. La policière soupira et ouvrit un tiroir pour prendre les vieux documents papiers des déclarations de vols et pertes. Elle prit un stylo qui se trouvait sous sa chaise, n'en trouvant aucun sur le bureau. Elle remplit le bordereau réservé à la police avant de s'intéresser au cas de la jeune femme.

"Alors. J'aurais besoin d'un prénom et d'un nom ainsi que d'une adresse."

Après que la jeune femme lui ait donné ses informations, non sans lui avoir demandé d'épeler son prénom et son nom, Lusitania prit de le temps de s'avoir comment tourner ses phrases. Ressentant soudain une douleur dans la poitrine, la jeune femme chercha un anti douleur dans son sac et l'avala avec une petite gorgée d'eau. Toussotant légèrement, Lusitania releva la tête vers son interlocutrice.

"Alors, dites moi ce qui vous a été dérobés et pourquoi vous pensez à un vol plus qu'à une perte. Car j'ai bien cru comprendre que vous pensiez plus à un vol qu'à une perte."

Arnkatla était particulièrement rassurée de voir que l'on pouvait s'occuper d'elle. Elle redoutait la liste de paperasses qu'elle aurait à remplir, surtout qu'elle n'avait jamais vraiment fait déclarer ses oeuvres depuis son arrivée sur le Skyline. L'idée de vivre dans un lieu pour l'éternité avait exclu pour elle toute idée de vol, de perte ou même de vente de ses oeuvres. Elle avait bien prévu d'être cette fille qui continue de peindre éternellement sur des toiles blanches, des paysages ou non existants sur le Skyline. Aussi elle était particulièrement furieuse à l'idée que quelqu'un ait pu oser lui prendre une de ses toiles. Elle ignorait s'il existait un marché noir dans ce monde, elle priait que non bien que ses tableaux n'aient probablement aucune valeur. La jeune policière la guida vers un bureau et lui tendit une chaise avant d'elle-même s'asseoir en face. Elle alluma un ordinateur mais celui-ci semblait peu coopératif, elle finit par se saisir de document dans un tiroir qu'elle commença à remplir. Arnkalta l'observa faire en silence. Elle n'avait jamais vraiment fréquenté d'agent de police, de nombreux militaires, oui, de toutes horizons mais rien de plus, pas même dans son pays. La jeune femme lui demanda alors son identité, nom, prénom, adresse.
Arnkatla sourit puis lui répondit, attendant la question qui viendra sans attendre.

- Arnkatla Hrafnsdottir, 1573 Cloud Street.

La question suivante ne se fit pas attendre et elle entreprit d'épeler comme à chaque fois, ses noms et prénoms.

- Arnkatla. A-R-N-K-A-T-L-A. Hrafnsdottir. H-R-A-F-N-S-D-O-T-T-I-R

Elle l'observa noter ses premières informations puis attendit les prochaines questions. Cette dernière parût ressentir une douleur et s'arrêta pour prendre un médicament avant de se retourner vers elle. Arnkatla était intriguée mais elle n'en montra rien. Les demandes arrivèrent ensuite.

- Je suis artiste peintre de profession. Je n'ai jamais exposé mais je possède un certain nombre de toiles chez moi, plus d'une centaine en réalité. Je ne les ai jamais déclarées mais j'en tiens moi-même le compte. Suite aux dégâts provoqués par le séisme, je me suis retrouvée à faire le compte de mes toiles afin de voir les effets que le tremblement avait pu avoir sur elle. J'ai recompté plusieurs fois mais le compte n'y était pas. Je vous ai amené la liste exacte des toiles manquantes avec les traits caractéristiques. Elles sont toutes signées de ma main. Ils m'en manquent une dizaine au total.

Elle se redressa sur sa chaise, puis se saisit de la liste dans sa poche pour la déposer sur le bureau devant la policière. Elle se sentait un peu mal à l'aise dans cet environnement comme souvent quand elle sortait de chez elle. Elle n'était pas du genre accusatrice mais ses tableaux étant tous ce qu'elle avait, elle en prenait toujours le plus grand soin. Une perte lui paraissait totalement inenvisageable.

- Je vis seule et quand je sors de chez moi, c'est généralement pour aller peindre une autre toile. Ce sont les seuls biens que je possède réellement et j'en prends le plus grand soin. Je n'ai jamais perdu une toile et même si le séisme a fait quelques dégâts chez moi, il n'y a rien de suffisamment conséquent qui aurait pu m'amener à perdre un de mes tableaux. Donc oui, vous avez raison, je pense plutôt à un vol. Et puis, sans vouloir accuser personne en particulier, je n'ai pas non plus d'excellentes relations avec les quelques voisins que j'ai pu croisé.

Elle sourit, nerveusement, presque ironiquement. Les relations avec son voisinage étaient pour ainsi dire inexistantes si on omettait les regards et les remarque déplacés qu'ils aimaient bien lui lancer. De là, à se plaindre de tous, ça n'était pas nécessairement le cas. Depuis dix ans qu'elle était là, elle n'avait jamais vraiment fait la conversation avec l'un d'entre eux.

ღ Arnkatla et Lusitania

Lusitania écouta avec attention ce que lui expliquait la jeune femme. Elle eut un petit geste de nervosité en entendant parler du seïsme où elle même avait été grièvement blessé lorsque le Vintage Hotel avait été touché. Elle écrivit tout ce qu'elle lui disait, pouvant s'en servir au court de l'enquête. Quand Arnkatla lui tendit la liste des oeuvres disparus, Lusitania s'en saisit et la parcouru rapidement des yeux avant de la poser à côté d'elle. Cette liste sera photocopiée et joint au dossier. Mais un exemplaire en sera distribué à chaque policier. Lusitania ne savait pas si cela permettrait à la jeune femme de retrouver ses oeuvres mais on ne pourrait pas l'accuser de n'avoir rien fait. La policière tiqua quand la jeune femme accusa ses voisins. Elle eut soudain comme un flash et vérifia l'adresse. Puis, elle héla un autre policier.

"Hey, Perez! C'est pas toi qui est sur le cas des voisins hystéro de la Clood Street?
- Si porqué?
- Je pourrais avoir ton rapport?
- Ouais."

Alors que le dit Perez allait chercher le dit dossier, Lusitania termina de remplir le papier avec les informations d'Arnkatla. Mais de ce que Lusitania savait des voisins de la jeune femme, Arnkatla avait raison de les accuser. Certes, la policière était un fervent défendeur du droit à la présomption d'innocence mais avec ce que la jeune femme savait, de grands soupçons planaient sur eux. Perez revint enfin avec le dossier et Lusitania le parcourut des yeux.

"Alors... Le couple Bernyer. Sur le skyline depuis 35 ans... Venue déposer plainte pour la première fois il y a 7 ans suite à un problème de voisinage avec leur voisine au nom imprononçable. Classé sans suite car on avait pas le nom. Ils sont revenus très souvent pour parler de leur voisine hystérique de la peinture. Et soudain, plus rien depuis le seïsme alors qu'ils venaient au moins une fois toutes les deux semaines... En effet, vous êtes assez mal lottie avec le couple Bernyer."

Lusitania avait eu l'occasion de les croiser et ils ne lui avaient pas fait bonne impression et elle avait été heureuse de ne pas les avoir comme voisins. Elle poussa le dossier des voisins et se recentra sur celui d'Arnkatla.

"Alors, voilà ce que nous allons faire. Avec ce que vous venez de nous raconter et ce que nous savons déjà sur vos voisins, nous avons suffisamment d'éléments pour demander au juge un mandat de perquisition. Ce dernier devrait nous être délivré dans les 2 prochains jours. En attendant, un policier sera posté devant votre immeuble, pour vérifier qu'ils ne sortent pas les toiles, si jamais ce sont eux qui les ont."

Arnkatla regarda l'agent prendre en note toute sa déclaration avec soin. Elle était nerveuse mais contente malgré tout de voir l'affaire avançait. Elle fut surprise en revanche quand elle la vit interpeller un collègue. Les voisins hystéro de Cloud Street ? De quelle histoire pouvait-il bien s'agir ? Le policier revînt peu après avec son rapport sur le sujet et Arnkatla observa son interlocutrice avec curiosité. Cette dernière le parcourait des yeux avant de faire une déclaration à voix haute.
Les Bernyer. Arnkatla se souvenait très bien d'eux. C'étaient les rares voisins dont elle connaissait le nom. Ils étaient aussi les plus virulents. Là où les autres se contentaient en général de regards et de chuchotements déplacés, ces derniers étaient beaucoup plus bruyants. Elle n'avait jamais vraiment compris ce qu'ils lui reprochaient d'ailleurs. La jeune femme avait toujours essayé de se montrer correcte même quand l'envie n'y était pas et les années l'avaient rendu particulièrement discrète, à la limite de l'impolitesse parfois, il est vrai mais c'était surtout du silence plutôt que des mots blessants ou gênants
Ainsi donc ces deux-là étaient venus déposer plainte contre elle. L'idée avait quelque chose de scandaleux. Depuis sept ans donc. Elle tenta de se rappeler ce qu'elle avait bien pour faire à l'époque pour les amener à agir de la sorte mais rien ne lui vînt. Tout juste, peut être, avait-elle réagi à leur remarque un jour. Mais elle ne levait jamais le ton et malgré sa maîtrise des armes n'avait jamais formulé de menaces ou autres. De là à revenir toutes les deux semaines depuis sept ans, il y avait de l'acharnement. Elle allait devoir se retenir d'aller leur mettre son poing dans la figure quand elle rentrera. Hystérique de la peinture ? Arnkatla serra ses poings sur ses genoux. Elle était bien bonne celle-là ! Elle tenta de conserver une figure calme mais derrière elle bouillonnait. Les dernières semaines n'étaient décidément pas les meilleures. Elle remarquait une forme de compassion dans le ton de la jeune policière et elle était contente de voir qu'elle passait bien pour la victime et non la coupable. Ils semblaient bel et bien que ces deux-là avaient atteint le summum

- C'est le moins qu'on puisse dire. C'est bien la première fois qu'on me reproche de peindre. Je n'ai jamais eu le sentiment de gêner qui que ce soit pour tout vous dire. J'ai du louper quelque chose.

Lusitania poursuivit sur la procédure qu'elle souhaitait suivre et elle l'écouta avec attention. La démarche semblait rapide et elle était vraiment heureuse de voir qu'elle prenait les choses en main avec sérieux. Arnkatla se permit un sourire. Elle avait peut être un espoir de retrouver ses toiles en fin de compte.

- Je vous remercie. J'ai placé toutes les autres en lieu sur mais je serais vraiment contente de retrouver celle-ci. Si je puis vous aider pour quoi que ce soit. En général, je sais plutôt bien me défendre, j'ai droit au port d'armes, ce n'est pas pour rien mais je dois vous avouer que j'évite d'en arriver là.

ღ Arnkatla et Lusitania

Jamais Lusitania n'aurait aimé avoir des voisins comme les Bernyer. Elle leur aurait dit sa façon de penser directe, comme elle pouvait elle même l'être. Un peu trop parfois même selon certains de ses amis. Mais voilà, 26 ans que la miss était ainsi et pas question de la changer, c'était impossible. C'est ainsi que la jeune femme ne put qu'hocher de la tête quand Arnkatla lui dit qu'elle avait surement dut louper quelque chose. Mais bon, la jeune femme avait d'autres voisins et aucun d'entre eux n'était venu se plaindre de la jeune femme à la police. C'était don que les Bernyer avait quelque chose soit de personnelle soit de complètement débile à reprocher à Arnkatla. Lusitania avait très bien vu la réaction de la demoiselle quand elle avait évoqué la mot "hystérique". Comme elle la comprenait. Elle aussi aurait bien aimé allé leur en toucher deux mots si cela avait été elle la victime.

"Je pense plutôt que vos voisins vous en veuillent pour je ne sais quelle raison débile. Nous n'avons reçu auune autre plainte de la part d'autres voisins et puis... Vous ne semblez pas hystérique comme les Bernyer nous l'ont dit. Vous êtes inquiète pour vos peintures, ce qui est logique. Vous avez passé du temps à les peindre et voilà qu'on vous les a volé. Je l'aurais également très mauvaise si j'étais à votre place."

Sauf que Lusitania se retenait de toucher à un pineau ou à un crayon, elle ne savait absolument pas dessiner. La photographie d'accord, elle était bonne et elle pouvais très bien décidé d'en faire son métier si jamais elle était virée de la police. Ce qu'elle n'espérait pas. Elle se souvient encore de son dernier dessin, au collège. Elle avait voulu dessiner une amie comme eclle-ci le lui avait exigé et cela avait été une catastrophe. Elle s'était brouillée avec son ami, avait arrêté de dessiner et avait décidé de ne plus se laisser marcher sur les pieds et dicter sa conduite. Elle aurait bien aimé rire à cette petite anecdote mais sa poitrine lui faisait terriblement mal. Elle revint à la réalité que Arnkatla lui dit qu'elle avait un droit de port d'arme. Ah, Lusi ne savait pas cela. En même temps, avec ce foutue tremblement de terre; elle n'avais pas le dossier d'Arnkatla.

"J'espère que vous n'aurez pas à vous en servir. Je n'ai aucune envie de vous voir revenir ici avec les menottes aux poignets. Si vous avez un droit de port d'armes, je présume que vous avez des armes, non?"

Il y avait chez la jeune policière, un ton qu'appréciait Arnkatla. Elle avait perdu de vue certains comportements ou certaines attitudes mais elle savait noter ce qu'elle pouvait bien prendre ou non. En général ses voisins étaient responsables des mauvais. Ils n'étaient pas tous ainsi bien sur mais elle croisait peu les autres qui la laissaient tranquille. Elle préférait ce type de comportement.
Une raison débile ? Peut être bien. Ils étaient possibles qu'ils aient eu un jour une mésaventure avec un peintre ou bien l'un d'eux était-il un artiste raté ? Elle ne serait pas vraiment étonnée. L'opinion qu'elle avait d'elle-même lui donnait l'air déplacé de penser qu'ils pouvaient alors s'agir de jalousie, mais cela pouvait bien être le cas. Certains sentiments vous aveuglent au point de ne plus faire la part des choses. Ou alors était - elle simplement leur bouc-émissaire, leur passe-temps dans la mort ? Peut être y avait-il eu une autre victime de ce genre dans leur vie terrestre ? Avec curiosité, elle se demanda de quoi ils pouvaient bien être mort mais elle n'était pas sure de pouvoir un jour obtenir l'information.

- Je vous remercie. J'aimerais avoir des voisins aussi compréhensifs que vous, même si je me doute que vous faites surtout votre métier. - elle sourit, se mordit la lèvre et poursuivit - Ça peut paraître étrange voire complétement dingue, mais je me souviens de chacune des toiles que j'ai peinte au cours de ma vie et encore plus depuis ses dernières années. Elles n'ont aucune valeur marchande mais elles ont beaucoup de valeur pour moi.

Elle s'arrêta et baissa les yeux. Elle s'intéressa à la dernière question de l'agent et sourit brièvement à l'idée de la voir réapparaître dans ses lieux les menottes aux poignets. Ça ne serait pas la première fois mais elle avait été incapable de tuer de son vivant alors de sa mort ...
Elle pensa aux quelques armes qu'elle gardait chez elle. Elle en portait aussi toujours une sur elle, cachée dans sa botte. Une vieille habitude de son vivant, de son passé en Afrique puis dans les fjords sauvages de son Islande natale.

- J'espère aussi. Oui en effet, j'en possède trois. Deux chez moi, un 9 mm, un 45 et celui-ci. - elle sortit l'arme de sa botte et la posa doucement sur la table devant elle, déchargé - J'ai une carte pour les trois. - elle fouilla brièvement dans son sac et sortit son portefeuille, elle déposa le permis et les trois cartes de déclaration sur la table - Je ne m'en sers pour ainsi dire jamais mais c'est une vieille habitude que j'ai conservé de mon vivant. Je ne sors jamais désarmée.

ღ Arnkatla et Lusitania

Lusitania commençait à apprécier la conversation qu'elle avait avec Arnkaltla. D'accord, la jeune femme faisait son travail mais pas que cela. Elle était toujours sympathique avec les gens qui avaient des problèmes... Plus qu'avec ceux qui en posaient. Hors, tout le commissariat connaissaient les Bernier et il était sans dire que la jeune femme ne devait pas avoir fait grand chose pour les mettre en colère contre elle. C'était un vieux couple, présent au Skyline depuis très longtemps. Ils étaient aigris et la personne qui avait habité l'appartement de la jeune femme avait elle avait déjà eu des problèmes avec eux d'après le dossier. Le reposant au loin, Lusitania reporta son regard sur Arnkatla.

Elle avait une très bonne mémoire pour ce souvenir de toutes ses toiles. Lusitania ne se souvenait même pas du seul dessin qu'elle avait bien pu faire un jour. Elle ne savait plus ce qu'elle avait voulu dessiner. Le résultat était trop peu ressemblant pour que la policière ait été marqué à vie. Par contre, elle se souvenait de toutes les personnes qu'elle avait arrêté et celle qu'elle avait été obligé d'abattre. Déformation professionnelle ou simple choc... Aucune idée, toujours est il que les noms et visages étaient gravés dans l'esprit de la jeune femme.

"Personnellement, je préfère vos souvenirs professionnels aux miens. Se souvenir de toiles de peinture doit être plus agréable pour la vie privée que de se souvenir des personnes que l'ont a arrêtés."

Autant ne rien dire sur les personnes qu'elle avait été obligé de tuer, Arnkatla devait déjà s'en douter. Car après tout, tuer quelqu'un est souvent plus "mémorable" qu'une arrestation. En tout cas, elle écouta avec attention l'arsenal que possédait la jeune femme. 3 Révolvers... Elle avait plus que Lusitania. La jeune femme ne possédait que son arme de service et une arme de secours, rangée chez elle, dans sa table de chevet. Elle regarda les cartes de détention ainsi que le permis avant de s'intéresser à l'arme que la jeune femme avait posé sur le bureau. Elle la prit en main et l'observa. C'était une bonne arme de défense, discrète mais efficace. Elle visa un point sur le mur avant de la reposer sur le bureau.

"C'est une bonne arme. Très efficace si l'on veut pouvoir se défendre."

La situation paraissait évoluer dans la bonne direction. La jeune agent était impliquée et Arnkatla appréciait d'être écoutée tout comme elle appréciait de ne pas être considérée comme une affabulatrice. Ce n'était pas sa première expérience avec la police même si c'était la seule de sa mort. Avant cela, elle avait eu l'occasion de les voir apparaître pour la disparition de sa mère en Islande, après la mort de son père en Afrique, parfois dans le cas de conflits avec des tribus puis la dernière fois après la mort de son mari. En général, ils étaient donc plutôt signes de mauvais souvenirs. Venir à leur rencontre n'était pas quelque chose qu'elle avait aimé mais la jeune femme face à elle avait la capacité de la rassurer. Voir les forces de l'ordre d'un autre oeil qu'en tant qu'interrogateur avait quelque chose d'appréciable.
Lusitania lui avoua se souvenir des personnes qu'elle avait arrêté au cours de sa vie. Elle le comprenait. Au delà de ses toile, elle se souvenait aussi bien du visage de ses ennemis politiques que des enfants qu'elle avait pu aider. Il y avait parfois des choses qui marquaient. Le souvenir de ses toiles était par ailleurs une des seules choses qui lui restaient dans la mort, son esprit était donc libre de les retenir.

- Je suppose, oui. Je n'ai probablement pas rencontré autant de gens que vous dans ce type de situation mais je me doute de ce que ça doit faire, pour avoir quelques exemples en tête. Les choses ne changent-elles pas dans un monde comme celui dans lequel nous nous trouvons maintenant ?

Elle ne savait pas trop pourquoi elle posait cette question mais aujourd'hui encore elle avait du mal à visualiser les différences entre le Skyline et le monde des vivants.
Elle déposa ensuite son arme sur la table. L'agent la saisit et la pointa vers un mur avant de la reposer.

- C'est un ancien militaire qui me l'avait conseillé quand j'étais en Afrique de son vivant. La situation est différente mais je me suis dit que je pouvais continuer de la conserver.